Inactinique

Il y a des mots qui excitent sans le vou­loir, des mots aux­quels on prête un sens qu’ils n’ont pas. C’est d’eux dont parle la rubrique «Les mots érogènes».

Par­fois le désir nous affole, par­fois on n’est pas fou de désir. L’humeur, la dis­po­ni­bi­li­té, une peau qui ne va pas avec la nôtre, une odeur sub­ti­le­ment désa­gréable, un mot qui sou­dain coupe toute envie…

Inac­ti­nique, ce serait l’adjectif s’appliquant à cet état par­ti­cu­lier qui fait que, non, on n’a déci­dé­ment pas le goût de bai­ser avec elle, ou avec lui (ou avec les deux). Pour­tant, à la voir, on s’était dit qu’elle était très atti­rante, cette per­sonne. Un corps attrac­tif, une manière pro­met­teuse de bou­ger, de s’humecter les lèvres, de pas­ser sa main dans ses che­veux. L’envie nous prend de l’embrasser, de res­pi­rer dans son cou, de cares­ser ses fesses, de faire tout ce que l’on fait quand on le fait pour la pre­mière fois, à la fois d’au­da­cieux et de tâton­nant. Et puis, non, déci­dé­ment, ça ne le fait pas. On a bai­sé sa bouche, ou pas, on a peut-être même ban­dé un peu, mouillo­té, bais­sé nos culottes, frot­té nos sexes, essayé de le faire, par devant, par der­rière, on a gémit pour s’en­cou­ra­ger, cares­sé la pointe de ses seins, pin­cé, pour voir, bala­dé nos doigts… Rien. On pense sou­dain à autre chose, pas for­cé­ment de très impor­tant, et on remarque cette gri­mace qu’elle fait ─ cette per­sonne qu’on a cru dési­rer ─ lorsqu’on la touche à tel endroit, ce petit bruit de la bouche, ce sou­pir un peu ridi­cule. C’est inac­ti­nique, inutile d’insister, ça ne le fera pas. On dit qu’on est stres­sé, ou un peu dépri­mé, que ce n’est pas de sa faute, qu’on est déso­lé, qu’on va en res­ter là; on s’en va. Une fois dans la rue, libé­ré, on sou­rit, sou­la­gé, et on va boire un verre de vin blanc au café.

Inac­ti­nique, dans le Petit Robert, «se dit d’un rayon­ne­ment qui n’a aucune action chi­mique sur un milieu don­né». C’est par exemple la lumière de la chambre noire, en pho­to­gra­phie. Mais il y a quand même une image sur la pho­to, comme après quelques verres de blanc un nou­veau désir appa­raît.

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- Inutile d’in­sis­ter, Ray­mond, je suce votre sexe depuis 30 minutes, et vous voyez bien que rien ne se passe.

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- Mais non, Simon, ce n’est pas de votre faute si je ne mouille pas. Vous léchez très bien, mais je viens de me sou­ve­nir que j’ai oublié d’ar­ro­ser les fleurs avant de sor­tir de chez moi. Il faut que j’y retourne… 

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- Allez, remonte ta culotte. On ne va pas se men­tir: entre nous, il n’y a pas de désir, ça se voit tout de suite. Allons plu­tôt boire une bière. 

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- J’a­vais très envie de faire l’a­mour avec vous, mais je n’aime pas du tout l’as­pect de vos tétons, et pour moi c’est mal­heu­reus­ment rédhibitoire. 

Les mots éro­gènes déjà publiés
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