Suite et fin du billet sur la sortie d’Orgasmo (le début ici), de Christophe Bier et Jimmy Pantera, aux Editions Serious Publishing.
Le volume 2 d’Orgasmo s’ouvre sur un très bel avant-propos dessiné de Pierre La Police, puis se poursuit avec le chapitre concernant les Jungle Goddess, ces Tarzans au féminin «que se disputent des aventuriers au visage buriné» (les textes entre guillemets sont tirés d’Orgasmo, ndlr). Il y a notamment, en 1956, Liane la sauvageonne, «guimauve en Estmancolor tournée dans une Afrique reconstituée à Naples avec des Ethiopiens fournis par le consulat du coin». L’actrice principale s’appelle Marion Michael, et sa nudité «perverti le spectacle familial. Un vrai régal pour les érotomanes.»

Education sexuelle
Les Hygiene pictures (inventés dès la fin de la première guerre mondiale par les Allemands, qui les appellent Sexualaufklärungsfilme) sont des «films d’informations sexuelles». Avortements, accouchement sans douleur, césarienne, syphilis: ils présentent tout à la fois L’éveil de l’amour et Les dangers du désir, se veulent éducatifs et préventifs. Dans les années soixante, ils abordent quelques «anomalies sexuelles», comme le sadomasochisme ou… l’homosexualité. «Ces pensums sont bientôt remplacés par des enquêtes bidonnées avec fausses interviews, faux médecins, mais vraies délurées.»


Trans
Les films Transgenre, peu nombreux, abordent le sujet des hommes qui se font opérer pour devenir des femmes. Comme Ajita Wilson, «la star transsexuelle du cinéma d’exploitation européen», qui tournera notamment dans Sadomania (1980) de l’Espagnol Jess Franco «en zaroffienne et lesbienne tortionnaire, humiliant des prisonnières enchaînées dans des cages…»


Fouets
Tortured, c’est des «corps bondagés, emprisonnés, flagellés, humiliés, soumis, démembrés». Le genre est aussi intéressant par le fait qu’il exploite certaines vertus de la religion: «Le sadisme du spectateur se dissimule derrière le complaisant alibi des pages sanglantes de l’Histoire. Le film biblique consomme du chrétien martyr. L’inquisition surtout est une source abondante de cris et de supplices.» Dans un des sous chapitre de Tortured, où l’on parle des «victimes exquises aux indéniables qualités plastiques mais pas toujours grandes tragédiennes», on apprend avec une petite joie sadique que «découragé par son incapacité à exprimer la souffrance, le malin cinéaste, Massimo Pupillo, fait sursauter Rita Klein avec une petite décharge électrique.» Il y a aussi les WIP (Women in Prison) et leurs «fouilles au corps, douches collectives, examens médicaux, promiscuité et étreintes lesbiennes», ainsi que des films commeElsa Fraulein SS ou Nathalie rescapée de l’enfer nazi, qui «soulèvent la conscience de plus d’un critique» mais n’ont pas de prétentions historiques, sont «dans une surenchère grand-guignolesque qui rappelle les extravagantes couvertures des Men’s Adventure Magazines.»


Gros seins
Big Busty Babes est un genre traitant en majesté les grosses poitrines. «Révélation du western Le Banni (1943), produit par le milliardaire Howard Hughes, qui avait la passion des gros seins, les 90D de Jane Russell (aide pour ceux qui n’y connaissent rien en taille de soutien-gorge, ndlr) agressent les censeurs. Un juge déclare que “sa poitrine y remplissait l’écran comme une tempête remplit un paysage”.» On pense immédiatement à Russ Meyer, mais «il faudrait jeter les deux yeux dans le cinéma turc, riche en stars capiteuses et en débordements charnels.» Parmi ces héroïnes mammaires, il y a celles du nudie-cutie, «comédie farfelue accumulant un maximum de filles nues (…) Ne pouvant montrer les poils pubiens, les cinéastes compensent en filmant des poitrines surdimensionnées comme celle de la strip-teaseuse Virginia Belle (130 cm de circonférence !), surnommée Ding Dong.» Il y a aussi Dyanne Thorne, qui a droit à tout un sous chapitre dans Orgasmo: «sa lourde poitrine, difficilement comprimée par l’uniforme, le décolleté de sa blouse blanche rappellent les formes cartoonesques de Bill Ward.»



Et voilà que déjà se termine le deuxième volume d’Orgasmo. On en voudrait plus, mais, devant affronter ce manque soudain, on se rend compte que chaque image pourra encore être dégustée — et encore, qu’il s’y cache une multitude de détails à découvrir (des regards, des aisselles, des positions de corps, etc.). Sans parler du graphisme des affiches et de leurs textes, dont l’efficacité est passionnante à étudier.
«Orgasmo est le titre original d’un giallo réalisé en 1968 par Umberto Lenzi», explique Christophe Bier dans sa préface. Surtout, c’est un titre qui tient sa promesse.
Les deux volumes sont en deux langues (le minimum pour du sexe conviviale) et les Suisses romands peuvent les trouver à la librairie Humus de Lausanne, ou les commander sur le site de Serious Publishing pour ceux qui ne descendent jamais de leur montagne.
En 2011, Christophe Bier avait dirigé l’édition du Dictionnaire des films français pornographiques & érotique (Serious Publishing), un monument dont je lis régulièrement l’une ou l’autre des 1813 notules, comme d’autres dégustent des chocolats fourrés.
Jimmy Pantera, lui, est également l’auteur de Los Tigres del Ring, un superbe livre, richement illustré, sur la Lucha Libre, le catch mexicain (Editions Ankama, 2009).
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