Ce dessin à l’encre de chine d’Armand Avril fait désormais partie de mon patrimoine. Un de mes descendants en héritera, celui qui aura la charité de faire jusqu’à la fin l’aller et retour entre la chambre où je gésirai* et la cave à vin. Je l’ai acheté à l’Espace Richterbuxtorf, la jeune et sympathique galerie lausannoise qui exposait dernièrement l’octogénaire artiste français.
A l’heure de l’accrocher chez moi, une question se pose: est-il érotique ou pornographique? Pour le dictionnaire culturel en langue française (Le Robert, donc, que je feuillette après l’amour comme d’autres fument), l’érotisme est «ce qui a trait à l’amour physique, au désir et au plaisir sexuels». La pornographie, elle, est une «représentation (…) de sujets obscènes, destinés à être communiqués ou vendus au public.»
Si le dessin d’Avril est de toute évidence érotique par son sujet, est-il pornographique dans son intention? Est-il obscène? Est-il ce «qui offense ouvertement la pudeur; qui présente un caractère très choquant en exposant sans atténuation, avec cynisme, l’objet d’un interdit social, notamment sexuel»?
Arrivé là, deux constatations s’imposent. La première est que la lecture du dictionnaire est un plaisir solitaire, comme la cigarette. La seconde, que l’obscénité dépend de l’état présent de la pudeur et des interdits sociaux. De l’humeur aussi. Et lorsque je regarde ma nouvelle acquisition, la mienne, d’humeur, est excellente, je jubile.
C’est sans doute ce à quoi pensait Avril en écrivant «Ça jute» au-dessus de la date.
*En principe, le verbe gésir ne se conjugue plus au futur. C’est pourtant élégant et, de plus, nous gésirons tous un jour ou l’autre.
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