Face­book est un lieu para­doxal. Notam­ment parce que si les pho­tos de nus sont sou­vent inter­dites et les pro­prié­taires des comptes où elles appa­raissent ban­nis pour quelques temps, il y existe des groupes et des comptes ouver­te­ment éro­tiques, du moins dans leurs textes. Pour inter­dire une pho­to, il suf­fit de la voir, pour un texte, il faut com­men­cer par le lire. C’est la revanche de l’écrit sur l’image.
De demande d’amitié en demande d’amitié (les amis de mes amis étant peut-être mes amis), j’ai fait quelques inté­res­santes décou­vertes, dont je vous par­le­rai régulièrement.

Dany la soumise

Je com­men­ce­rais par Dany Labrune. Qui se cache der­rière ce pseu­do­nyme? Je n’en sais rien. Une brune, un blonde, une femme, un homme… Quelqu’un qui aime écrire, c’est cer­tain. Et qui nous livre régu­liè­re­ment le récit des aven­tures de Dany la sou­mise, laquelle subit volon­tai­re­ment les caprices sexuels de plu­sieurs maîtres. Ce n’est pas ce que je pré­fère comme genre éro­tique, mais ça me fait quand même par­fois ban­der, sans doute parce que j’apprécie tant la démarche que la façon d’écrire de Dany Labrune.
Je l’ai contac­tée en MP (mes­sage pri­vé) et lui ai deman­dé si elle vou­lait bien répondre à quelques ques­tions. Elle l’a fait par retour de mail.

Que peut-on savoir de vous?
La pré­sen­ta­tion d’une per­sonne qui se veut ano­nyme est évi­dem­ment très dif­fi­cile. Sans doute les réponses aux ques­tions sui­vantes éclai­re­ront un peu cette exi­gence de dis­cré­tion. Pour sim­pli­fier disons que je suis une (encore) jeune femme dans la qua­ran­taine, d’un milieu plu­tôt aisé et conser­va­teur (le milieu, pas moi!). J’ai fré­quen­té dans ma jeu­nesse des éta­blis­se­ments reli­gieux, où je me suis fait remar­quée par mon indis­ci­pline et mon esprit de contra­dic­tion. Ce qui m’a valu une exclu­sion d’un col­lège catholique.
Je suis mariée avec un homme beau­coup plus âgé que moi, malade depuis plu­sieurs mois, pour qui je res­sens une très grande tendresse.

Vous écri­vez des textes basés sur les pra­tiques SM. Pour­quoi ce genre, pour­quoi ce choix?
Une décou­verte tar­dive. Peut-être après avoir vu Emma­nuelle, par hasard, sur un dvd. Cette vision du film m’a trou­blée. Je me suis alors pen­chée un peu sur l’œuvre du Mar­quis de  Sade. Et ces lec­tures me plai­saient, me trou­blaient pro­fon­dé­ment. (J’avoue avoir sou­vent lu ces divines pages en tenant le livre de la seule main droite!) Comme je ne pou­vais que les lire qu’en cachette (cela fai­sait par­tie des auteurs inter­dits!!), c’est deve­nue une lit­té­ra­ture de mes fan­tasmes, ce que j’appelle par­fois mon «jar­din secret», dans lequel je cultive une très belle rose, la masturbation!

Votre pseu­do indique que vous êtes «sou­mise». Est-ce le cas? A qui, à quoi?
Dans ma vraie vie, abso­lu­ment pas, plu­tôt auto­ri­taire et j’ai sale carac­tère. Mais dans mes délires, mes jeux fan­tas­més, je le suis effec­ti­ve­ment. J’aime dia­lo­guer avec des Maîtres, de vrais domi­na­teurs, ten­ter de com­prendre leur moti­va­tion et leurs exi­gences, et «vivre» en scé­na­rii aus­si divers que variés une impos­sible soumission.

Vous publiez sur Face­book. Pourquoi?
En réa­li­té, ce fut un pur hasard. Je cher­chais des contacts ailleurs, sur des sites spé­cia­li­sés. Mais je trou­vais ces contacts trop réels, trop … contrai­gnants. Je ne suis pas une spé­cia­liste de Face­book et j’ai cru pen­dant long­temps qu’il n’était pas pos­sible d’ouvrir un compte par­ti­cu­lier. Un «ami» m’a fait connaitre la pos­si­bi­li­té d’ouvrir un compte qui ne ser­vi­rait qu’à mes jeux. J’ai trou­vé un monde très divers, beau­coup de fan­tas­meurs (même si la plu­part refusent de l’admettre!), des «double-compte» qui se font à eux-mêmes les ques­tions et les réponses! (Sans doute une forme nou­velle de la mas­tur­ba­tion!!), enfin toute une faune assez inter­lope. J’ai donc pris l’habitude de «jouer» mon jeu de «Dany la sou­mise» en per­ma­nence dès que je me connecte (Tout en pré­ve­nant tou­jours que je suis une sou­mise vir­tuelle). J’ai sur­tout trou­vé des rela­tions sui­vies, ami­cales, qui s’acceptent mutuel­le­ment dans leurs jeux et leurs personnages!

Après chaque «cha­pitre», vos lec­teurs vous font des remarques. En quoi est-ce inté­res­sant pour votre tra­vail d’écriture?
C’est un de mes plus grands plai­sirs. Pour plu­sieurs rai­sons. La pre­mière, c’est que ça éta­blit une com­pli­ci­té entre  scrip­teur et lec­teur, comme dans toute écri­ture; mais sur­tout,  ici cette com­pli­ci­té est en temps réel. Je parle aux lec­teurs de Dany, comme si c’était une connais­sance com­mune. Cela la fait vivre. C’est tel­le­ment vrai que plu­sieurs «amis» sont per­sua­dés que ce feuille­ton est une bio­gra­phie! La seconde, c’est que les réac­tions des lec­teurs influent sur le dérou­le­ment de l’action! La troi­sième, pour quelqu’un qui essaie d’écrire, les com­pli­ments sont tou­jours valo­ri­sants, ma modes­tie devant en souffrir!

Vous uti­li­sez l’humour dans vos récits, ce qui n’est pas com­mun dans le SM. Pourquoi?
Tout sim­ple­ment parce que j’aime ça! Mais aus­si, je pense, que l’humour per­met de se dis­tan­cier de réa­li­tés racon­tées par­fois un peu trop fortes pour moi! La petite bourge veut bien par­ler de cul, mais en se cachant der­rière la dérision!

Votre héroïne se pré­nomme Dany, comme vous. Qu’il y a‑t-il de vous en elle?
Rien et tout. Rien parce que ses aven­tures ne sont pas les miennes, tout parce que  son tem­pé­ra­ment cor­res­pond bien au mien. Avez-vous remar­qué que bien qu’étant sou­mise, Dany conser­vait la plu­part du temps une  sorte de fier­té? Même si elle s’avilit, elle tente de res­ter digne.

Vous êtes consciente que vos récits pro­voquent diverses émo­tions à vos lec­teurs, dont l’excitation sexuelle. Est-ce exci­tant pour vous?
Oui, bien sûr! Je pense que l’écriture éro­tique est faite pour créer des émo­tions, des émois dirais-je! Et j’avoue que lorsqu’un lec­teur me confie en Mes­sage Pri­vé qu’il a pous­sé à son terme la recherche de son propre plai­sir, j’éprouve de la satis­fac­tion. C’est ce que j’appelle «Faire l’amour AZERTY». Il est bien rare que l’écriture d’un épi­sode me laisse indifférente!

Quel plai­sir pre­nez-vous à écrire?
Un très grand plai­sir. Une éva­sion, un moyen de quit­ter un ins­tant un monde fait de grises bana­li­tés, pour rejoindre un monde ima­gi­naire, dans lequel mes fan­tasmes, mes rêves, me conduisent vers des che­mins interdits!

Voi­là, pour en savoir plus, pour décou­vrir ces textes et suivre les aven­tures de la sou­mise, il ne vous reste plus qu’à faire une demande «d’amitié» à Dany. Si elle accepte, vous y pren­drez sans doute du plaisir.

J’en ai à nou­veau pro­fi­té pour publier quelques pho­tos de Bet­tie Page.